lundi 23 février 2009

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"Comme un millefeuille"

À Paris, au Théâtre du Rond-Point, ce soir, dans le noir, du monde riait. Peu informé avant d’être plongé dans l’obscurité, le public était libre d’interpréter la notion d’« opéra clownesque ». Des clowns qui chantent, un opéra aux paroles délurées ? Pas du tout. Ou bien si, un peu ! Olivier Martin-Salvan, qui ne joue pas moins de vingt personnages à lui seul pendant une heure et quart, emmène le spectateur dans les coulisses d’un Opéra où va se produire le célèbre opéra-comique « Carmen ».

Le comédien raconte les répétitions de spectacle en dévoilant progressivement ses capacités surprenantes. Sans décor ni déguisement, il change brusquement de lieu, de personnage. Adoptant un accent pour le metteur en scène, une poitrine autant imaginaire que généreuse pour la maquilleuse, de longs cheveux pour Carmen, un petit sourire retroussé pour le chef d’orchestre… Du baryton à la soprano, Olivier Martin-Salvan ose et dose. Décalage dans le jeu mais également dans la mise en scène sont au programme. Un comédien masculin costaud imitant une jeune femme qui sautille avec légèreté : fabuleux ! Le comédien livre au public son talent, qui ressemble à un mille-feuille. On le voit doué, on le voit simple, on s’y attache.

Cette balade qu’il propose au cœur d’un univers artistique agité, où le budget et les heures avant la première représentation sont serrés, est ambitieuse. Si le spectateur réussit progressivement à comprendre l’histoire, saisir les particularités des personnages, des moments d’égarement demeurent tout au long de la pièce. Ainsi, le premier quart d’heure est décevant. L’humour grotesque ouvre le bal, et il faut s’accrocher pour comprendre qui est qui : quatre personnages imaginaires qui échangent, mais un seul homme en scène ! Notre imagination est vivement sollicitée, habilement aidée cependant par les gestuelles et bruitages étonnamment justes auxquels se livre Olivier Martin-Salvan.

Outre le rire, le spectateur entrevoit la réalité du monde qui existe derrière les rideaux. En effet, le metteur en scène Nicolas Vial et la dramaturge Anne Reulet-Simon, notamment, sont allés enquêter préalablement auprès de professionnels liés à l’opéra afin de pouvoir en parler à leur manière : clownesque.

De son côté, le pianiste Aurélien Richard interprète remarquablement la musique originale de Georges Bizet (Carmen) en alternant avec ses compositions propres. Il tourne quasiment le dos à la salle mais, entre deux morceaux, on peut le voir froncer les sourcils, prendre des airs méprisants, intrigués… Jeu en définitive assez curieux, car en voyant ses expressions de visage, on attend davantage de lui. Pourtant, il ne nous donnera rien de plus. Olivier Martin-Salvan ne l’y invite d’ailleurs pas puisque il ne le regarde jamais.

Main dans la main, sourires et clins d’œil échangés : c’est pendant les applaudissements nombreux que l’on découvre la grande complicité qui lie les deux hommes. Divertissante, la pièce l’est assurément, et pour ceux qui apprécient l’absurde ils auront l’occasion de rire davantage…

Amicie de Vannoise, in Les Trois Coups


"O Carmen"

Crise oblige, voici une version économique de l'opéra de Bizet qui force l'admiration et détend l'atmosphère. Carmen en une heure dix chrono pour un comédien solo et un virtuose flegmatique au piano: telle est l'acrobatie lyrique accomplie à la perfection par Olivier Martin-Salvan co-auteur avec Anne Reulet-Simon et Nicolas Vial de cet O Carmen à haute valeur hilarante. Clown-polyvalent, chanteur polyphonique, ce jovial homme-orchestre ne se contente pas de chanter tous les rôles d'une belle voix; il est aussi machiniste, décorateur, radioréveil, toutou à sa diva, musicien étourdi, chef d'orchestre au bord de la crise de nerfs, femme de ménage... Divanissimus.

Jean-Michel Ulmann, in Impact Médecine n°267

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